Aurélie Dupont, le 18 mai 2015 |
Soirée d'adieux hier pour la danseuse Aurélie Dupont sur la scène du Palais Garnier. Pour son ultime révérence, l'Etoile interprétait le rôle de Manon Lescaut dans le ballet éponyme de l'écossais Kenneth MacMillan. Une soirée prévue de longue date, ultra médiatisée, pour laquelle l'Opéra de Paris a fait les choses en grand avec, côtés danseurs, une distribution multi-étoilée réunissant Stéphane Bullion, Alice Renavand, Benjamin Pech et même Karl Paquette, méconnaissable geôlier, ainsi que la venue de l'italien Roberto Bolle en tant qu'étoile invitée (suite à la malheureuse blessure d'Hervé Moreau). Côté média, la représentation était filmée par le réalisateur Cédric Klapisch et retransmise en direct dans plus de 300 salles de cinémas.
Chaleureusement applaudie dès son entrée, l'Etoile a dansé devant un public entièrement acquis à sa cause. Désireuse d'offrir une représentation "parfaite" au public, la danseuse a incarné l'héroïne de l'Abbé Prévost du début du ballet jusqu'au pas de deux final. Que l'on adhère ou non à son jeu (parfois trop intellectualisée ?), l'œil est attiré par la magnétique Aurélie Dupont. livrant une interprétation personnelle, légère et mutine au premier acte, séductrice au second pour finir épuisée en haillons au dernier. A ses côtés, Roberto Bolle est un partenaire de choix, et même si ses qualités d'acteur laissent un peu à désirer (avec des réactions trop surjouées à mon goût), il faut bien avouer qu'il a su mettre en valeur comme il se doit la ballerine. Il a brillamment assuré les périlleux portés sans le moindre accroc, comme celui de la chambre où le couple était à l'unisson. Le tout avec complicité et bienveillance.
Du côté des seconds rôles, une fois de plus, Alice Renavand et Stéphane Bullion ont été piquants et excellents dans les rôles respectifs de Lescaut, le frère de Manon et de sa maîtresse. Enfin, au deuxième acte, les trois gentilshommes Yannick Bittencourt, Axel Ibot et Hugo Marchand ont offert un beau trio. Sans oublier le chef des mendiants d'Allister Madin.
Une belle représentation, maîtrisée et très esthétique, où finalement il manquait ce soupçon d'émotion pour la rendre totalement bouleversante.
Le rideau se ferme sur le corps inanimé de Manon, et c'est une ovation que reçoit la danseuse, avec tout Garnier debout. Joie et quelques larmes. Bouquets de fleurs et étoiles scintillantes pleuvent sur scène. Une standing ovation salue la danseuse Étoile, qui est rapidement entourée de ses deux fils, venus lui apporter un magnifique bouquet. Les deux adorables petits ont vite pris goût à la scène et aux applaudissements, faisant totalement abstraction du public, jouant avec les confettis, et accompagnant leur mère à chaque salut. Petit pincement au cœur tout de même quand Hervé Moreau apporte un bouquet de roses blanches à la danseuse (Quel beau Des Grieux il aurait fait...!), émotion quand Manuel Legris, le partenaire de toujours, la prend dans ses bras. Pierre Lacotte, qui lui a donné La Sylphide et Paquita avant qu'elle ne se blesse, Benjamin Millepied, Brigitte Lefèvre viennent à leur tour embrasser l'Etoile. La ballerine file dans les coulisses chercher les autres Étoiles féminines pour saluer avec elle, avant que toute la petite famille de l'Opéra ne les rejoigne. Puis, le rideau se fermera une dernière fois, et la fête se poursuivra côté coulisses. La soirée n'est pas finie. À la sortie, quelques spectateurs sont interceptés par des journalistes.
Dire au revoir à Aurélie Dupont, c'est aussi dire au revoir à l'étoile de l'enfance, celle que l'on a vu pour la première fois dans La Belle au bois dormant à la télé un soir d'hiver. Aurélie Dupont c'est aussi les souvenirs de l'éternel partenariat avec Manuel Legris et du pauvre DVD de Don Quichotte rayé.
Pour autant, Aurélie Dupont n'a pas dit son dernier mot à l'Opéra. Elle prendra la fonction de maîtresse de ballet dès la saison prochaine. Elle dansera dans l'Anatomie de la sensation de McGregor en juillet à Bastille.